Moi… Mylène

Interview pour Première !

A la grande surprise de tous, Mylène a accordé une interview au magazine Première.
Pour rappel ce magazine, entièrement dédié au cinéma, avait consacré un article à Giorgino (octobre 1994) lui attribuant une très mauvaise critique, presque même assassine ! Pas de rancunes donc avec cette excellente interview où Mylène y parle de sa relation avec le cinéma, de sa rencontre avec Pascal Laugier et nous liste même quelques films d’horreur marquants pour elle ! Retrouvez l’intégralité de cette interview dans le n°483 sorti le 7 mars.

Lire l'intégralité de l'interview

Vous avez souvent dit que le cinéma était « plus que nécessaire ». Qu’il s’agissait d’un « besoin vital ». Ça veut dire quoi ?
Composer un personnage, évoluer au sein d’une famille imaginaire, devenir une mère qui risque sa vie pour sauver ses enfants est un cadeau que m’offre le cinéma. L’opportunité de vivre autre chose est un besoin vital… oui ! Bien sûr oui. C’est un peu comme une récréation de l’âme. La promesse de vies multiples avant le retour, parfois pesant, au quotidien. J’ai l’incroyable chance de rencontrer le public depuis des décennies dans mon domaine de prédilection et je n’ai qu’une seule chose à leur offrir : ce que je suis. Le cinéma est un « ce que je pourrais être… ».

Pourquoi n’avoir tourné que deux films ?
J’ai concentré toute mon énergie vitale à ma passion : écrire et interpréter, monter sur scène. Allez vers « l’autre » est ma raison de vie. La puissance électrique d’un concert est une expérience quasi mystique. C’est le plus beau métier du monde. Le cinéma est avant tout une question de rencontre avec un personnage, une histoire, un metteur en scène. Ces rencontres sont rares mais pas impossible ! Ghostland en est la preuve. De mon côté l’envie a toujours été présente mais il fallait qu’elle soit pleine partagée. C’est ce qui s’est passé avec Laurent Boutonnat et Pascal Laugier. Le désir de quelqu’un est un moteur puissant pour se réinventer… Il n’y a pas d’aventures sans frissons.

Je me suis toujours demandé d’où venait votre obsession des stars de l’âge d’or hollywoodien. Votre de scène fait clairement référence à Frances Farmer et vous avez signé une chanson en hommage à Garbo… Ce sont des inspirations ? 
Oui ! Elles m’inspirent le respect. Leur courage est immense. Ce sont des pionnières d’un combat, celui de la reconnaissance des femmes dans un domaine artistique. Ces femmes ont du caractère, sont insolentes, fragiles et sans concession. Elles ont dit « non » quand le « oui » était de mise. C’est probablement pour cela que certaines d’entre elles ont été broyées par le système. Il faut du courage pour faire accepter sa différence. Aujourd’hui, j’ai l’impression que l’on tend vers une uniformité de genre, où tout le monde se ressemble. L’uniformité et l’art ne sont pas de bons amis.

Parmi les artistes à qui vous avez confié vos clips (de Luc Besson à Marcus Nispel, Abel Ferrara ou Ching Siu-tung) beaucoup pratiquaient un cinéma de genre. Quel est votre rapport à ce cinéma si présent dans votre univers ?
Dans le cinéma fantastique ou d’horreur, il y a un contrat moral très intime entre le réalisateur et le spectateur qui l’autorise à le laisser explorer vos peurs les plus primales, vos angoisses, vos névroses. Tout ce qui est de l’ordre du « jardin secret ». C’est, j’imagine, la raison pour laquelle ce genre de cinéma est très clivant. Il y a ces contes cruels auxquels on s’abandonne volontiers lorsqu’on est enfant et ces films d’horreur qui viennent vous bousculer à l’âge adulte. Au fond, il n’y a aucune différence. Ce cinéma vous rappelle que vous avez été un enfant. Dans ce genre, de nombreux films me touchent : Le Labyrinthe de Pan, Le Locataire ou Rosemary’s baby, L’Exorciste forcément, Suspiria, Inferno, Carrie, Pulsion… Mais il y en a tant d’autres…

Comme Martyrs ? 
Oui. J’avais aimé l’audace de ce film « coup de poing ». Je pense que Martyrs est une œuvre sans concession dans laquelle Pascal Laugier nous dit clairement qu’il assume ce genre (qu’il maîtrise très bien par ailleurs). C’est une étape importante dans son parcours qui lui a probablement donné la possibilité d’écrire un Ghostland vraiment réussi, plus sophistiqué et tout aussi efficace. Me voilà critique de cinéma ! (Rires.)

Pourquoi avoir choisi Pascal Laugier pour réaliser votre clip City of Love ?
J’ai suivi attentivement son travail depuis son premier film, Saint Ange. Il a un univers extrêmement dense que chacun de ses films révèle peu à peu. Pascal est un cinéaste très érudit. Mais c’est surtout un auteur passionnant et un metteur en scène très exigeant. Je le trouve courageux dans ses choix, son parcours. Et comment ignorer qu’il a eu l’audace de me proposer Ghostland ? Mais c’est moi qui ai fait le premier pas pour City of love. Je cherchais un réalisateur capable de créer un univers étrange, gothique et poétique à la fois, tout en ayant le sens du rythme. Le choix de Pascal était évident.

Dans City of Love, Pascal Laugier se mettait au service de votre univers, avec Ghostland vous intégrez le sien. Le passage de l’un à l’autre s’est-il fait naturellement ?
C’est valorisant de confronter son expérience comme le feraient deux personnes qui ‘n’ont pas les mêmes outils mais travaillent de la même manière. Nous avons des points communs, nous sommes viscéralement « dark » mais attirés par la lumière.

Vous acceptez facilement de vous mettre au service d’un autre créateur ? 
S’il s’agit de partage, oui. S’il s’agit de dictature, non ! Je suis un être libre qui ne supporte pas l’autorité. Mais la plupart du temps cela se passe très bien. Il n’y a des morts dans dans le script. (Rires.)

Qu’est-ce qui vous a séduire dans l’offre de Pascal Laugier ?
Sa confiance totale et irréversible. Son désir de travailler avec moi. Pascal est quelqu’un qui ne se préoccupe pas des préjugés, il sait, il veut, il fait. Il vouait que je sois une mère prête à tout pour sauver ses deux filles de la barbarie. Je le suis devenue pour lui.

Vous vous souvenez de ce que vous ressenti en lisant le scénario ?
Il m’est apparu dès la première lecture que le script était incroyablement captivant et bien ficelé en jouant sur les dimensions rêve et réalité. C’est un peu un train fantôme en trois dimensions dans lequel on prend plaisir à prendre place même si on sait que le voyage risque d’être chaotique. Je n’ai suggéré aucune modification, vous pensez ! Si ce n’est le prénom de mon personnage. A l’origine, elle s’appelait Colleen. Nous avons beaucoup échangé sur le rôle de Pauline avant que Pascal ne me laisse « l’habiter ». Quand je suis arrivé à Winniped pour les essayages des costumes, j’ai choisi un manteau qu’il a apprécié. J’ai senti que c’était important que j’adopte une silhouette qui correspondait au personnage. J’aime bien son approche, vous laisser vous approprier l’âme et la coquille.

Ghostland pourrait être : doit-on s’échapper du réel ou au contraire l’affronter ?
La vraie question serait plutôt : peut-on s’échapper du réel ? La réponse est malheureusement négative. S’il existe un domaine où la règle impose que l’on doive fuir le réel, c’est bien l’art en général et le cinéma en particulier. Je suis définitivement du côté du rêve, là où la vie prend toute sa dimension.

On retrouve dans votre personnage de Ghostland, une constante de votre musique et de vos clips : vos personnages sont toujours des femmes fortes, individualistes, libérées… 
Fortes et fragiles à la fois. Et un peu barrées aussi… (Rires.) On dit des hommes qu’ils évoluent et se façonnent tout au long de leur vie. Imaginez les femmes !

Mylène Farmer, Première n° 483, mars 2018

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